Les hydrolats font partie, au même titre que les huiles essentielles, de la panoplie à disposition de l'aromathérapie. Ce ne sont pas des sous-produits négligeables, loin de là ! Les mettre de côté, c’est ignorer tout un pan de l’aromathérapie. Ils ont tous de nombreuses propriétés. Ils sont peut-être plus simples d'utilisation que les huiles essentielles, et on les recommande pour les personnes sensibles. Mais attention, ils peuvent avoir aussi leurs contre-indications…
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Qu’est-ce qu’un hydrolat ?
Le mot “hydrolat”, c’est au départ un terme de pharmacie. Il désigne une “préparation aqueuse obtenue en distillant de l’eau où baigne une substance végétale”, nous dit le dictionnaire. À mon avis, ça manque un peu de précision : la matière végétale, dans le cas d'une distillation à la vapeur, ne baigne pas dans l'eau.
Le mot aurait été construit à partit de hydr-, qui signifie eau, ou peut-être du mot hydrol, qui désigne les eaux minérales d'une manière plus globale. Et du suffixe -at, sans doute sur le modèle du mot "alcoolat" (l'eau de Cologne est un alcoolat).
Eau florale
On parle aussi d'"eaux florales”, mais il me semble que c'est moins approprié : les hydrolats ne sont pas tous obtenus par distillation de fleurs. On va donc en rester à “hydrolat”, la fraction aqueuse obtenue au moment de la distillation à l'eau ou à la vapeur, qu'on peut séparer de l'huile essentielle produite au même moment.
Il en existe sans doute autant que d’huiles essentielles – je ne compte pas les essences d’agrumes, vous lirez pourquoi plus loin. Vous trouverez donc facilement des hydrolats de lavande, de menthe poivrée, de camomille noble ou de camomille matricaire (allemande), de sarriette des montagnes, de géranium, etc. Elles ont toutes des principes actifs différents.
Les hydrolats, de l’eau “thérapeutique” ?!
Vous allez me dire que si les hydrolats sont de l'eau, comment peut-on leur attribuer des vertus thérapeutiques ? Bonne question, vous avez l'esprit pointu ! 🙂 En fait, ils sont autre chose qu'une eau simple. Vous avez entendu parler des eaux minérales, qui sont composées aussi d'éléments dont le corps peut bénéficier ? Comme cette eau minérale chargée en magnésium et en sulfates, par exemple, plutôt efficace quand il s'agit de décoincer des intestins un peu paresseux… Donc oui, une eau peut contenir de nombreux éléments actifs. Et c'est le cas aussi des hydrolats, qui contiennent des éléments actifs des plantes dont ils proviennent.
Des molécules différentes
Je vous disais donc plus haut que ces hydrolats s’obtiennent au moment de la distillation. En même temps que l’huile essentielle produite à partir de la plante distillée. Quand j’explique ça, j’ai souvent droit à un regard étonné et une question : pourquoi l'hydrolat n'a-t-il pas du tout le même parfum que l'huile essentielle, le plus souvent ? C’est assez simple à comprendre, en fait : ce sont d'autres molécules extraites de la matière végétale qu'on trouve dans l'hydrolat. Des molécules qui ne sont pas hydrophobes : elles sont hydrophiles (elles “aiment” l'eau), . Elles ne sont pas dans l'huile essentielle, qui contient, elle, les molécules lipophiles (qui “aiment” le gras).
Des petits pourcentages
La fraction de ces molécules hydrophiles est très réduite : elle représente en général 0,05 à 0,2 millilitres pour un litre d'hydrolat. C’est peu, je suis d’accord avec vous, mais ça n’empêche pas d’être efficace. Si vous connaissez un peu les huiles essentielles, vous savez peut-être que l’huile essentielle de bergamote contient rarement plus de 0,3 % de bergaptène. C’est vraiment très peu, et pourtant, c’est cette molécule, en aussi petite quantité, qui rend cette huile essentielle très photosensibilisante.
Hydrolats
des principes actifs
même en concentration réduite
Pensez aussi aux infusions ou tisanes de plantes : elles contiennent une petite partie des principes actifs des plantes. Mais elles ont de vrais effets, que vous avez sans doute déjà constatés : une tisane de camomille matricaire avant de se coucher facilite, pour beaucoup, un endormissement en douceur.
Au même titre que ces tisanes, les hydrolats peuvent être ingérés sans craindre la dermocausticité de certaines huiles essentielles. D’ailleurs, il est probable que vous en avez déjà consommé ! L’eau de rose, l’eau de fleurs d’oranger (dans les crêpes par exemple, un petit arôme supplémentaire que beaucoup apprécient ! :p).
Bref, les hydrolats, c’est un petit pourcentage de molécules pour des effets tout aussi costauds ! :p
Attention aux faux hydrolats !
Faites attention aux appellations. Je me souviens qu’il n’y a pas si longtemps, on trouvait en vente, sur un très gros site de commerce en ligne, un “hydrolat de jasmin”. C’est-à-dire qu'on y vendait quelque chose qui n’existe pas ! On ne distille pas le jasmin, et il n’existe pas d’huile essentielle de jasmin : on ne produit qu’une absolue, par extraction à l’aide de solvants. Donc, pas d’“hydrolat de jasmin”. Le site en question a d’ailleurs changé l’appellation depuis, et vend maintenant de l’“eau aromatique de jasmin”.
En aromathérapie, la précision est plus qu’importante. Soyez vigilant·e aussi si vous trouvez des hydrolats de zestes d’agrumes. Leur essence est extraite par pression à froid, sans distillation ni à l’eau ni à la vapeur d’eau. Il n’y a pas séparation des molécules par la chaleur, comme expliqué plus haut, et donc pas de production d’hydrolat. Ça ne veut pas dire qu’il n’existe pas d’hydrolats obtenus à partir des feuilles de certains agrumes. C’est le cas par exemple pour le citron, ou le petit grain bigarade. Vérifiez bien l’origine de l’hydrolat.
Comment choisir son hydrolat à l’achat ?
Avec la même attention et la même exigence de qualité que vous exercez lorsque vous achetez des huiles essentielles ! Seuls les hydrolats de bonne qualité pourront vous apporter leurs bienfaits. Alors assurez-vous, autant que possible, du respect des critères suivants. L’hydrolat doit :
Si vous n’avez pas de garantie dans ces domaines-là, vous ne savez pas du tout si votre hydrolat est de qualité !
De même, vous préférerez les hydrolats distillés spécifiquement dans cet objectif, et à partir de plantes fraîches. Les hydrolats obtenus dans le cadre d'une distillation d'huile essentielle perdent un grand nombre de leurs composants sous la pression rapide à vapeur.
Protégez vos hydrolats !
Enfin, lorsque vous les rapportez chez vous, résistez à la tentation de les humer directement au flacon. Les hydrolats sont très sensibles à la contamination par les bactéries. Versez-en quelques gouttes dans une cuillère ou dans un petit verre, si vous voulez en vérifier l'aspect ou le goûter. Mais ne mettez pas votre nez au-dessus de l’ouverture du flacon ! Refermez-le aussitôt et mettez-le au frais, si vous n'en avez pas l'usage dans l'immédiat.
Certain·es recommandent d’y verser une ou deux gouttes de vitamine E ou d’extrait de pépins de pamplemousse, pour en assurer une meilleure conservation. Quoi qu’il en soit, leur durée de conservation excède rarement les 6 mois. Par ailleurs, si vous les intégrez à une lotion, conservez cette lotion au frais, de la même façon, pour allonger sa durée de conservation.
Pourquoi utiliser des hydrolats plutôt que des huiles essentielles ?
Hydrolats et huiles essentielles ne s’excluent pas mutuellement ! On recourt aux uns ou aux autres, et parfois aux deux, en fonction des besoins. Parfois, un hydrolat peut suffire là où une huile essentielle déploierait trop de puissance.
Prenons un exemple. La recherche médicale a montré que lorsque un système immunitaire est affaibli, il est inutile, voire contre-productif, de trop essayer de le stimuler. Il risque de se produire l'effet inverse! Le corps d’une personne affaiblie n'est pas toujours en mesure de traiter ou d'accepter de fortes doses de stimulants. En réaction, le système immunitaire risque de tenter d'augmenter son activité, sans en avoir les moyens, et s’épuiser. C'est d'autant plus vrai pour un système immunitaire qui n'est pas encore complètement développé, comme celui des enfants.
Sensibilité olfactive
De plus, leur sens olfactif est beaucoup plus sensible que celui des adultes : les huiles essentielles peuvent les aider, mais en des quantités bien moindre que celles que les adultes peuvent traiter. N'oubliez pas l'impact des molécules d'huile s essentielles qui filent directement vers le cerveau et la circulation sanguine par le biais de la respiration. Il suffit parfois d’une micro-goutte, dans le cas d’un système olfactif tout jeune. Mais une micro-goutte d’huile essentielle, sérieusement, ça reste vraiment difficile à mesurer !
Un hydrolat peut être aussi efficace en ce cas qu’une huile essentielle, sans certains des risques d’irritation que ces dernières présentent. Mieux encore, de nombreux hydrolats ont des propriétés anti-inflammatoires : ils calment, apaisent les irritations !
Comment utiliser les hydrolats ?
Le domaine d’application est très vaste et dépasse largement le cadre de cette présentation. Voici en tout cas quelques suggestions…
Enfants et personnes sensibles
Sans dilution, voie cutanée
Verser l'hydrolat sur une compresse et appliquer cette compresse sur la zone concernée, de 30 secondes à une minute. Ensuite, refaire l'opération avec une nouvelle compresse. La camomille matricaire est efficace dans ces cas. Utile pour l'eczéma, l'érythème fessier, les poussées dentaires.
Sans dilution, voie orale
À réserver aux poussées dentaires. Une goutte d'hydrolat de camomille noble sur le doigt (soigneusement lavé au préalable) ou sur un coton-tige. Masser doucement la gencive douloureuse, 2 à 3 fois par jour. Avec l'hydrolat dilué, on peut aller jusqu'à 4 à 5 fois par jour.
Dilution
Pour diluer l'hydrolat, en verser une goutte par cuillerée d'eau distillée, puis verser une goutte de ce mélange dans une autre cuillerée d'eau distillée. Voilà pour la méthode et les proportions à respecter. Bien sûr, vous répéterez l’opération et adapterez en fonction de la dilution et du volume final que vous souhaitez. Il faudra tester la dilution qui convient dans le cas précis d'un petit enfant en particulier. Commencez par la plus haute dilution, et ne passez à une dilution moindre qu’ensuite, si la première n’a pas eu suffisamment d’effet. Enfin, pensez toujours à laisser le temps à l'hydrolat de déployer son action.
3 exemples d’utilisation des hydrolats (enfants, femmes enceintes)
Aide au sommeil
Hydrolat de camomille noble dilué appliqué sur les pieds, les poignets ou le dos pour accompagner un petit massage de détente.
Bain de préparation au sommeil
Verser une demie-cuillerée à café d'hydrolat de lavande fine ou de camomille noble dans l'eau du bain. Agiter pour bien mélanger.
Calmer l'inflammation cutanée
Mélanger les hydrolats de lavande fine et de camomille noble en proportions égales. Verser dans le double d'eau distillée, dans un flacon vaporisateur (spray) stérilisé. Après avoir nettoyé les fesses du bébé, vaporiser le mélange en fine brume. Attendre quelques instants avant de mettre la nouvelle couche-bébé.
Adultes
En soin et bien-être
Boisson : pour stimuler la consommation d’eau nécessaire au bon fonctionnement du corps, vous pouvez aromatiser votre eau. Ajoutez votre hydrolat en quantité suffisante pour en parfumer votre eau.
Boisson de soin : 2 cuillerées à soupe d’hydrolat pour un litre d’eau à consommer la même journée. Buvez de ce mélange pendant 3 semaines, puis faites une pause pendant 1 semaine. Ne reprenez ensuite que si l’effet recherché n’a pas encore été obtenu.
Gargarismes, bain de bouche : 1 mesure d’hydrolat pour 4 d’eau.
Démangeaisons : imbiber une compresse de l’hydrolat et l’appliquer sur la zone des démangeaisons. Renouveler la compresse 2 ou 3 fois. L’hydrolat d’achillée millefeuille est très indiqué pour les démangeaisons dues à l’eczéma, au psoriasis. À combiner avec l’hydrolat de cèdre dans le cas de dermatite de contact ou d’allergie, de varicelle…
Cosmétique
Démaquillant : parmi les plus efficaces, la camomille noble et le géranium. Versez l’hydrolat sur une compresse et démaquillez comme d’habitude.
Tonique astringent et antioxydant : hydrolats de sauge, de néroli, de ciste. En compresse ou brumisation.
Masque purifiant : ajouter l’hydrolat goutte à goutte à votre argile préféré jusqu’à obtenir la consistance désirée.
Compresses visages, pour réduire les gonflements et les cernes : hydrolats de ciste, d’hamamélis, de camomille noble (utiles aussi pour la rosacée, la couperose, les rougeurs) ; hydrolats de romarin (tous chémotypes), de sauge, de genièvre pour les peaux à tendance grasse ou acnéique. Pour l’acné, les boutons, on pourra ajouter quelques gouttes d’hydrolat de menthe poivrée ou de thym ct thymol. Imbiber les compresses d'hydrolat, s'allonger, appliquer les compresses sur le visage, se détendre pendant 10 minutes, retirer les compresses.
Consultez aussi la monographie de l’huile essentielle de rose de Damas, j’y donne quelques indications à propos de l’hydrolat de rose.
Les contre-indications
Il y a peu de contre-indications pour les hydrolats. Il en existe néanmoins dans certains rares cas. Renseignez-vous avec précision à propos de l'hydrolat que vous voulez utiliser. Et respectez les indications, c'est important pour votre santé.
Exemple pour l’hydrolat de néroli : idéal pour les peaux grasses, à éviter sur les peaux sèches et très sèches ; hydrolat de cyprès : à cause de ses propriétés diurétiques, éviter dans le cas d'affection rénales ou du foie…
C’est très clair comme explication, très simple. Je ne savais pas trop le lien avec les HE, maintenant je sais! Est ce qu’on peut dire qu’avant d’utiliser une HE on peut essayer avec l’hydrolat?
Merci Karine 🙂 Difficile de vous dire oui ou non de façon générale. Tout dépend de la raison pour laquelle vous voulez utiliser l’un ou l’autre. Les degrés d’efficacité, les modes d’utilisation surtout ne seront pas les mêmes. 🙂